Dans les rencontres informelles ou les cocktails officiels, on entend : « Le féminisme a changé ! Les militantes doivent se mettre au goût du jour ! » Les féminismes se sont développés en larges éventails dans le vent de l’Histoire et nous n’avons rien vu venir.
« Le 21ème siècle sera religieux » prédisait André MALRAUX. La laïcité, valeur centrale de la République pendant le 20èmesiècle, n’a pas tenu la route. Le 21ème a redoré le lustre de toutes les religions. Les horreurs perpétrées par les grandes puissances de l’athéisme ont épuisé l’espoir de créer de nouvelles utopies. Revenues aux commandes des sociétés, les religions encadrent les mœurs et coutumes des peuples. En même temps, perdure et s’amplifie la secte scientiste d’adoration de « l’homme nouveau ».
Cette fois ni Aryen, ni prolétaire, mais transhumanisé par la science, l’homme se pare de super-pouvoirs, grâce à des exosquelettes, des visions nyctalopes tous azimuts, des auditions hyper-Haute-Fidélité, des intelligences artificielles, pour gagner enfin la vie éternelle. Il lui suffit d’être dans les « winners ». Les « losers » iront prier leurs totems, érigés par leurs clergés. Seul compte le destin individuel, jusqu’à la faute originelle de ne pas être un.e élu.e.
Et le féminisme, dans tout ça ? Les arrière-grands-mères avaient jeté aux orties corsets et crinolines pour fêter leur droit de voter. Les grands-mères ont brûlé leurs sous-tifs en place publique pour obtenir contraception et compte bancaire. Les mères ont conquis l’avortement, la criminalisation du viol et même du devoir conjugal. Les filles ont eu leur magnifique moment MeToo de reconnaissance mondialement répercutée. Et leurs filles sont les nouvelles féministes. Elles se demandent si le voile est un bout de tissu sans importance ou un acte de pudeur religieuse, si, pour acheter un bébé sur catalogue, une grossesse devient altruiste, si la vente de services sexuels est un acte charitable pour handicapés.
Tout est flou. Le sort des femmes, des « F », n’est qu’une discrimination parmi tant d’autres. Il faut sauver tout le monde ou personne : les L, les G, les B, les T, les Q, les I, comme les F et mêmes les H, parce qu’il y a des hommes aussi ! Les races, les genres, les nationalités, les destins sociaux ou climatiques, tout n’est qu’inventaires de droits à conquérir ou à défendre. Les lois et les juristes nous sauveront tous ou pas du tout.
Le nouveau féminisme, c’est la fin de l’universalité des droits humains. Il n’est plus à la mode de dire qu’être une femme, c’est subir des violences du seul fait de son sexe.