Y a du débat chez les choucas ! Des oiseaux noirs se disputent les perchoirs. Ça jacasse dans les hémicycles comme ça déblatère au comptoir. Que d’énergie dépensée pour savoir qui saura le mieux coasser! Ça claque du bec, ça grince de dépit, ça s’ébouriffe le jabot. Que d’espoirs trompés dans l’enthousiasme des fausses promesses !
Les discours frelatés sont lancés à la volée tels des corbeaux criards. Modernes moulins à prières, les chaînes d’infos en continu enroulent à l’infini leur dénuement d’idées. Les pages des médias virtuels s’effeuillent au vent des fausses nouvelles. Que se passe-t-il ? Pourtant les morts meurent, les survivants pleurent, les enfants tremblent de peur. Mais ça va. Ça va passer. La flamme olympique a fait étape dans le village. Les habitants goguenards ont applaudi ce non-évènement de la journée. Ça va !
Pourtant les Sud-Soudanais périssent en masse. Les homosexuels sont pourchassés comme des punaises de lit à travers toute l’Afrique. Le 55ème féminicide français de l’année a gagné une médaille au journal télé ! Mais ça va. Nous sommes prêts à recevoir dans notre capitale les sémillants athlètes aux couleurs chatoyantes de toutes les nations pour leur permettre d’assouvir leur soif d’exploits et de victoires.
Le maillot jaune de Pogačar est phosphorescent de soleil à l’arrivée du Tour de France. Ça va ! On y croit ! Y’a pas à se faire de mauvais sang. Ce ne sont pas quelques oiseaux noirs qui vont troubler notre sommeil de bien-pensant.
Mais ça croît pourtant, ça prolifère ! L’oreille de Trump nous est offerte comme un trophée de fin de corrida. Après sa réélection, il nous promet la paix dans le monde. Les chenilles des chars de Poutine et de Xi Jinping grondent dans ses discours. Ça va, les corbeaux !
Vilains fouilleurs de poubelles, charognards des sombres ruelles et autres vautours de mauvaises nouvelles ! Ça va ! Vos criailleries de Cassandre mal embouché ne gâcheront pas nos vacances.
C’est sacré, les vacances, celles du bord de mer comme celle du pouvoir. Il faut se détendre après toutes ces émotions électorales, ces peurs de tout, ces urnes sans fond ni fondement, qui ont dispersé nos réflexions telles un vol de corneilles au-dessus d’un champ de blé. Après les fêtes nationales, après l’été, après les Jeux Olympiques, il restera le chant des corbeaux sur la plaine. La pluie effacera les larmes, comme elle dilue le sang impur et le glyphosate qui abreuvent nos sillons.