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Billet d’humeur

06/04/2016 : Alain Piot : VOTE ET SEMELLES AU PALAIS BOURBON

Le 6 avril 2016, après plus de deux ans de débats parfois houleux,  après de multiples va-et-vient entre l’Assemblée Nationale et le Sénat de la République, la proposition de loi visant à renforcer la lutte contre le système prostitutionnel et à accompagner les personnes prostituées a été définitivement adoptée. Un dicton populaire prétend que « les chiffres parlent d’eux-mêmes ». En ce qui concerne cette séance, qui fera certainement date, le discours des parlementaires s’entend à la semelle de leurs chaussures :

Députés élus à l’Assemblée Nationale : 577

Votants : 87

Votant pour la proposition de loi : 64

Votant contre la proposition de loi : 12

S’abstenant : 11

Et les 490 manquants, soit 980 semelles, où étaient-ils ? « Mais chez les putes ! » aurait dit un(e) humoriste. Ce n’est pas drôle ! Leurs chaussures ont parlé d’elles-mêmes. Elles ont dit tout l’intérêt qu’ils (elles) portent à ce problème qui met en jeu la dignité des femmes, l’égalité des femmes et des hommes, qui met en lumière la domination masculine, la violence masculine.

Les médias, en partie grâce aux députés, ne retiendront qu’une disposition : la pénalisation des clients, dans un texte qui comporte bien d’autres choses dignes d’intérêt !

On nous dira : Mais ça se passe toujours comme ça… Lorsque le résultat est acquis d’avance, les groupes parlementaires envoient leurs hallebardiers présenter les arguments du groupe et ça suffit ! Oui mais justement la quasi-totalité des groupes, après avoir présenté les arguments officiels, disaient laisser leurs membres se déterminer et voter en conscience. Les membres en questions étaient pourtant dispersés dans la nature ! On ne saura jamais qui a voté quoi, le vote à main levée ne le permettant pas.

Pour voter la dernière loi de finances, ils étaient quand même 564 sur 577. Là c’est du sérieux, n’est-ce pas ? Il est vrai que le vote est alors « solennel ».

 

19/03/2016 :                     BILLET D’HUMEUR N°7.                       Olivier Manceron.

GPA, trois lettres innocentes. GPA ? C’est peut-être une maladie nouvelle ? Un moustique bien trop tropical pour qu’on soit piqué ? « Grossesse pour autrui » Ça fait altruiste, genre ONG. Ça ressemble à PSA ou ABS ou BNP. Un petit acronyme pour une grande entreprise. Est-elle déjà en bourse, cotée au Quatre Quarante ? On est pour, on est contre. C’est beau comme Uber. C’est nouveau, c’est moderne, c’est dans le vent. Et puis, on se dit que c’est des histoires d’amour, des histoires intimes qui ne nous concernent pas. « Ils ont bien le droit ! Ils ont assez souffert ! Ils ont supporté leur stérilité, taraudés par leur désir d’enfant. Alors s’ils peuvent se le payer, c’est bien normal. Et puis, comment comparer aux prostituées ! Au contraire, il n’y a pas de sexe ! Et c’est quand même plus moral que d’aller acheter en cachette un gosse à adopter aux réseaux mafieux des pays pauvres ! Ça, c’est vraiment voler un enfant à sa mère ! »

Alors vous les féministes, vous allez arrêtez de nous embêter. Les femmes victimes, les femmes esclaves, etc. On en a soupé ! Dans la GPA, il n’y a pas de sexe. D’abord, il y a des gênes. Et les gênes, c’est pour les généticiens. Les gênes des mecs, c’est leur seule preuve qu’ils ont un gosse. Alors, silence, les femmes ! « C’est pas pour neuf petits mois qui leur apportent en plus une petite fortune qu’elles vont se plaindre ! Elles l’oublieront bien vite. Et puis là-bas, elles ne savent que mettre bas. Alors une grossesse de plus ou de moins ! » Et voilà, la vieille musique sexiste a trouvé une nouvelle partition, grâce à la science et à la médecine sans conscience, pour développer ses mélodies capitalistes, ses accents racistes et l’harmonie de ses arpèges féminicides.

Et le bébé ? Qui c’est qui s’en préoccupe du bébé ? Un bébé, ça a besoin d’amour ! Mais lui, il sera né dans un désert de pierre. Le cœur brisé de sa pauvre mère qui a vendu son âme au diable blanc, l’adulation de ses parents pour le ridicule petit mélange de leurs pauvres gênes, la perte de sa famille (sœurs, frères, grands-parents, de sa culture, de l’histoire de son continent), la perte de son paradis perdu, le doux chaud du ventre de sa maman… Il sera né dans un désert aride pour assouvir les fantasmes de ce monde cupide qui a commencé pour lui sur le marché des enfants volés.

 

20/02/2016 : Alain Piot : Quand la justice fait de la sociologie (de bazar) 

Le rappeur OrelSan était jugé en appel à Versailles pour « pour injures publiques à raison du sexe, et incitation à la haine, à la violence et aux discriminations à raison du sexe ». Il avait été condamné symboliquement en 2013 à une amende avec sursis. Aujourd’hui il est lavé de toute offense. Il disait dans son chef d’œuvre de 2009 à une fille : “Ferme ta gueule ou tu vas te faire marie-trintigner” ; “J’te quitterai dès qu’j’trouve une chienne avec un meilleur pedigree” ; “J’respecte les schneks[1] avec un QI en déficit, celles qui encaissent jusqu’à finir handicapées physiques » et autres gentillesses. Le tribunal a pensé que le rap est le reflet d’une génération désabusée et révoltée, le reflet du malaise d’une génération sans repère, notamment dans les relations hommes-femmes ». Bon. Mais c’est aussi une industrie qui rapporte ! On peut déjà estimer qu’ « expliquer n’est pas excuser. Qu’un appel à la haine des femmes n’est ni une attitude de révolte (contre quoi ?), encore moins une attitude désabusée (de quoi ?). Que l’auteur a bien choisi ses repères – sexistes, misogynes – dans sa conception des relations avec les filles et les femmes. Qu’il est loin d’être un paumé de la terre…

En 2009, j’avais dit sur un plateau télé que ces paroles du génie désabusé – et d’autres – étaient un appel à la haine et au meurtre, et étaient dangereuses. J’avais provoqué la stupéfaction des défenseurs du rappeur… Ce sont pourtant les arguments que développent les associations féminines au tribunal. Pour le tribunal, la liberté de création artistique ( !) est sans limite et que dans le cas présent c’est péché de censurer une « forme de création artistique inspirée du mal-être, du désarroi et du sentiment d’abandon d’une génération ». Ainsi sans doute qu’il est malséant de dénoncer les violences et les viols au prétexte de la liberté sexuelle – du mâle – ? On pourrait penser à ceux qui entendent ces textes et qui les comprennent au premier degré, qui n’ont pas la moue désabusée d’un juge d’Appel en toge qui en a vu d’autres !

Allons donc. Il reste encore du chemin à faire « contre les violences faites aux filles et aux femmes ». A lire d’urgence « Violences de genre, Violences du handicap » FDFA (février 2016 chez L’Harmattan).

[1] Escargots, en Lorraine. En argot : Vulve (= femme). Poétique, non ?

 

Le 19/02/16.                        BILLET D’HUMEUR N°6.                       Olivier Manceron.

Le handicap, c’est pas à toi. D’abord, c’est pas toi qui te l’est donné. La première fois que tu l’as rencontré, c’était un petit chiffre, tout gris, un petit pourcentage en bas de la carte de la MDPH. Un médecin ou deux se sont penchés doctement sur des tas de papiers et de formulaires compliqués. Et voilà, tu l’as attrapé. Après, t’as bien été obligé de t’y faire. Parce que les gens, eux, ils savent, ils connaissent ton handicap. Et si tu ne le comprends pas, ils te rajoutent tranquillement des petits problèmes insurmontables et des difficultés vicieuses pour qu’enfin tu comprennes, que tu mettes dans ta petite tête que t’en est une d’handicapée. Mais voilà, parce que toi t’oublie. Parce que toi, tu vis ta vie comme ça, à aimer ce que tu fais, à faire ce que tu sais bien faire, et surtout ce qui te plaît. Et toi, logique, tu te rends pas compte, t’es handicapée. D’ailleurs, c’est bien la preuve que tu l’es. Et si t’oublies, t’inquiètes pas, on va te le rappeler, sèchement, au prochain tournant, les « normaux », ceux qui normalisent les normes, ceux qui fixent ton prix « sur le marché de la bonne meuf », eux, ils t’attendent. Au prochain coin de rue, au prochain croisement, à la gare, au bureau, au supermarché, au guichet, à l’entrée de l’immeuble, au café, et… en famille, ils sauront te montrer qui ils sont, eux, les normatifs, les majoritaires, les normo-centrés. Là, tu te sentiras vraiment handicapée. Mais ce sera à cause d’eux ! Alors, n’oublie pas ! Toi, tu es cap ou pas cap, c’est tout ! Le handicap, c’est leur affaire.

 

19/01/2016    Olivier Manceron : APRES COLOGNE

            Nous étions peut-être trois cent, dans les vents tourbillonnants autour de la fontaine des Saints Innocents. Le froid nous tordait le nez. Il faisait sombre. Leur colère était belle. Au signal, elles ont dressé leurs drapeaux et ont scandé les slogans qu’elles avaient préparés. Elles étaient fortes, les féministes, fortes de leur colère contre les viols de masse qu’ont subis les femmes des villes allemandes. A Cologne, leur nuit du réveillon est devenu un calvaire. Des hordes stupides de viandes soûles se sont lâchement attaqués à nos sœurs, nos amies, nos filles en les tuant d’horreur, de peur et de salissures de leurs membres-tentacules avilisseurs. Nos sœurs parisiennes, les jeunes explosives comme les vieilles éléphantes, remplissaient la place mal éclairée de leur colère. Florence Mabille et moi nous nous réchauffions à leurs regards de flammes. Nous tenions haut la banderole de FDFA. Autour de ce groupe endiablé, le grand chancre du Forum des Halles semblait un monstrueux saurien échoué. Autour de lui, les rues blanches de la nuit laissaient des groupes sombres de jeunes hommes aux casquettes méprisantes. Porno-gavés, ils circulaient faussement indifférents. Autour de nous, le danger était là. Mais moi, je n’étais pas peu fier. Nous étions là pour toutes les femmes du monde.

 

18/11/2015. Olivier Manceron : LE FEMINISME INTOLERABLE

 

Effondrement des convictions, éboulements de désespoir, bouleversements des émotions… Un raz de marée de colère impuissante et de chagrin saumâtre enserre les gorges et serre les poings. La guerre a envahi Paris pour éteindre les lumières joyeuses des boulevards. Le sang s’écoule luisant sur le trottoir. Quand elle hait, la barbarie ne compte pas ses morts.

Une fois de plus, la sauvagerie sanglante et suicidaire était virile. Comment arrivent-ils à se convaincre d’être des héros, quand ils se bornent à tuer lâchement des jeunes femmes et des jeunes hommes désarmés ? Comment ces grands ados ont-ils été manipulés, transformés, mécanisés pour devenir des automates tueurs ? Des manipulateurs sadiques vieillissants ont su dans l’ombre faire de ces enfants inconscients des morts-mourants-meurtriers. Ces démiurges mourront riches, entourés de leur escorte de sbires, adulés par leurs fidèles et dans leur lit. La guerre ne tue que des jeunes hommes, héroïsés par des communautés démentes, fanatisées autour de leurs auto-martyres. Voilà la barbarie ! Elle est virile.

Cette hydre renaît à chaque fois de ses cendres. Chaque siècle compte ses brigades spéciales, ses escadrons de la mort et ses commandos cruels. Mais cette fois, le message a été explicite, et même étrangement clair. Depuis la célèbre  « nuit des temps », les jeunes hommes désarmés sont répertoriés comme négligeables dommages collatéraux, vaguement regrettables, il est vrai, car n’intéressant pas les glorieux affrontements des combattants patentés. Pour les jeunes femmes, leurs meurtres et leurs supplices sont recouverts de l’ombre épaisse de l’oubli, à peine évoqué dans des discours allusifs et goguenards : Ah ! Les belles cantinières et les joyeuses Madelon qui viennent servir à boire ! Mais le viol est le repos du guerrier. Les massacres-viols de masse des femmes du pays conquis restent l’argument massue et sous entendu, pour préserver le moral des troupes. Donc, rien que du vulgaire, du commun, de l’abject quotidien, depuis la plus haute antiquité.

Cette fois la cible des tueurs désigne, indique, démontre. Suivons la trajectoire de leurs balles écœurantes. Elles frappent des jeunes femmes libres. Elles sont libres de sortir le soir sur la place publique, de déguster une boisson au café, d’aller au spectacle, de rencontrer de jeunes hommes, libres eux aussi des contraintes coutumières. Elles sont libres de chevelure, de pensées, de discours, de sexualité, libres des chaînes familiales, religieuses et patriarcales. Alors, ils ont tiré. Ils ont tiré pour tuer, effacer, hacher la liberté… et particulièrement celle des femmes.

Elles étaient de tout pays, de toutes contrées, de tous les univers, cosmopolites et sans sectarisme, sans affirmation de caste (sauf peut-être celle qui arrive à s’offrir un café à cinq euros en terrasse !). Il y avait probablement parmi elles, des femmes en état de handicap, comme on dit, mais ça bien sûr, c’est passé inaperçu, dégagé sous le tapis épais du débordement médiatique.

S’il n’y avait eu ce soir là, que de jeunes hommes, admettez qu’il est fort peu probable que nos abominables les aient choisis pour cibles. L’ordre eût régné, dans une ronronnante normalité.

Il s’agit d’un horrible massacre. Mais c’est la liberté des femmes qu’ils voulaient détruire. C’est un féminicide épouvantable dans lequel les jeunes compagnons de ces femmes intolérablement libres ont été atteints. Préjudice collatéral. Pour cette fois, les rôles se sont inversés.

Ils ont voulu nous briser, détruire nos valeurs, mais l’intolérable valeur pour ces Nazislamistes, c’est le Féminisme.

 

 

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